Paul Sneidjer, la soixantaine, toulousain d'origine vit depuis plusieurs années au Québec. Après une première union avec Betty et la naissance de Marie il épouse Anna et devient père de jumeaux: Hugo et Nicolas.
Le 4 janvier 2011, il est victime d'un accident rare et étonnant: la chute folle, vertigineuse et effrénée de la cage d’ascenseur dans lequel il a pris place avec Marie, sa fille. Ni La jeune femme, ni les trois autres passagers ne survivent à la chute de l’ascenseur fou. Paul Sneijder est dans le coma.
Si on y regarde de plus près ce n’est pas en ce 4 janvier 2011 que la vie de Paul Sneidjer bascule mais le jour où sa seconde femme, Anna, refuse de façon catégorique et unilatérale la présence de Marie, dans leur foyer.
a) Les dommages collatéraux de cet accident sont énormes; Paul ne sera plus jamais le même. Il démissionne de son travail gratifiant à la Société des alcools du Québec pour un emploi misérable à "Dog Walker" et s'exhibe dans des concours de beauté pour chiens. Il ne se sépare plus de l'urne qui contient les cendres de sa fille et passe des heures à compulser livres et magazines pour nourrir sa monomanie des ascenseurs, au lieu de se réjouir de la carrière de sa femme et de ses fils.
b) Les avantages collatéraux de cet accident sont énormes *; Paul ne sera plus jamais le même. Il choisit un travail au grand air et promène des chiens dans la neige. Il développe une belle complicité avec les bêtes. Il se prend de sympathie pour l'avocat qui défend les intérêts du fabricant de l'ascenseur incriminé et préfère, plutôt que de porter plainte, se promener avec lui dans des jardins japonais. Il achète un billet d'avion pour Dubaï afin de prendre l'ascenseur et monter les 160 étages de la plus haute tour du monde. Il ne fait plus de concessions à sa femme et ne tient pas compte des conseils de ses fils.
Avec beaucoup d'humour, d'ironie et de causticité Jean Paul Dubois décrit
a) une dégringolade,
b) une reconstruction * affective, sociale et économique.
Il met en parallèle les existences d'Anna et de ses fils basées sur le socle de l'ambition et de la réussite et celle de Paul lucide et désabusé, épris de liberté et de vérité.
Avec finesse et discernement, l'auteur utilise la métaphore de l'ascenseur pour décrire les travers de notre société et de l'urbanisme.
" L'ascenseur n'entre pas dans la catégorie des objets de confort. Il est bien plus que cela. Il est le miracle mécanique qui a un jour permis aux villes de se redresser sur leurs pattes arrière et de se tenir debout. Il a inventé la verticalité, les grandes orgues architecturales mais aussi toutes les maladies dégénératives qu'elles ont engendrées."
Le ton persifleur de l'auteur, la personnalité attachante de Paul, looser et marginal, font du cas Sneijder un cas grisant et passionnant sur lequel il est urgent de se pencher.
* barrez le a), mention inutile et perfide.
Le coup de Coeur de Krol.
Éditions de l'Olivier- Octobre 2011-