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5 septembre 2011 1 05 /09 /septembre /2011 00:03

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   « L’école, j’en ai rêvé l’autre nuit. Ce matin, il fait jour malgré le brouillard. La question de savoir ce que je vais mettre comme habits ne se pose plus. J’ai choisi de mettre mes baskets à scratch, je ne suis pas grand (un poil plus d’un mètre) mais je ne suis pas bête : pas besoin de renouer des lacets. Bon, je ne vais pas faire l’inventaire de mon vestiaire. J’ai juste fait une concession, histoire de ne pas froisser ma mère. J’ai mis le pull rayé rouge et noir qu’elle a tricoté avec amour. En prenant un temps fou. A quatre ans et des poussières on n’a pas la haine. Mais moi, j’ai la laine sur les épaules. Je ne suis pas un mouton, mais un p’tit garçon. En plus il fait chaud.

   Ce matin je n’étais pas tout seul à me faire ce genre de réflexion. Les autres aussi devaient penser à ce que l’on nous oblige à porter. On a beau être haut comme trois pommes, on ne tient pas à avoir la honte. Très classe la rentrée des classes ! Enfin ! me voilà devant mon école, ma nouvelle maîtresse, mon préau, mon petit bureau, pas à côté du radiateur j’ai déjà un gros pull- non près de la fenêtre au cas où je souhaite voir ailleurs. Je regarde les autres. Tout ce petit monde sur son trente et un, et dans ses petits souliers. Les parents sont partis. Oh ! Ils ont longuement hésité, de peur que l’on ne pleure, nous ont couvé de bisous, malaxé dans leurs bras. Gentils. Mais aussi collants que le scratch de mes baskets. A ce soir.

   Je ne suis pas parti de la maison, je vais à l’école. Pas de quoi dramatiser. Je fixe mes petits camarades. Avec qui vais-je me lier ? Faire les 400 coups avec le clan des sept de la moyenne section ou le club des cinq de la grande section ? Dans ma classe il y a aussi des filles.

   On verra ça plus tard. La maîtresse a dû saisir un air rêveur glisser sur mon visage. Elle m’a parlé. L’école je vais sûrement en rêver encore cette nuit. Vivement demain. »

                                  Alexis Le Bihan

 

Bonne rentrée à tous!

 

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22 août 2011 1 22 /08 /août /2011 05:15

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Je reviendrai

gratter la terre et cueillir les couleurs. 

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9 août 2011 2 09 /08 /août /2011 09:50

    Sous les vêtements de pluie se cachent des blogueuses mordues de lecture...

    Elles s'appellent: Joëlle, Cécile, Françoise, Hélène, Emilie, Lucie, Brigitte, Gwenaëlle,  Mireille et Paola et s'étaient données rendez-vous à Huelgoat dimanche dernier.

 

huelgoat 08 11

 

    Sur une idée de Mireille, voici quelques titres pour illustrer notre journée dans les chaos et les sous-bois d'Huelgoat.

 

     -Haut tout est calme
         Un été sans les hommes
         Et devant moi, le monde
         La patience des buffles sous la pluie
  Des Garçons épatants
         Où j'ai laissé mon âme?
        A l’ombre du séquoia
         Tout près le bout du monde.


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  Merci Gwenaëlle pour l'organisation de cette rencontre.

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6 août 2011 6 06 /08 /août /2011 17:51

                      Pendant l'été le rythme de lecture galope et celui de l'écriture

de billets traîne...

 

Mélie

A Mélie, sans mélo de Barbara Constantine

   Clara a 10 ans et l’âge de passer ses vacances chez sa grand-mère. Ça tombe bien,  Mélie 72 ans se fait une joie de recevoir sa petite fille et de l’initier aux joies simples de la vie à la campagne : les balades à vélo, la pêche à la rivière, les cabanes dans les arbres, l’art du tissage chez les araignées…

   C’est sûrement bien sympathique de grimper sur un tandem et de s’élancer sur les rudes chemins campagnards ! Mais le nez trop près du guidon, l’auteure n’a pas vu que ses personnages manquaient d’épaisseur et de véracité, que les dialogues sonnaient dans le vide et que les répétitions étaient lassantes.

   Un cadre bucolique, des personnages multigénérationnels qui trouvent tous chaussure à leur pied mais une impression de déjà-vu qui ne joue pas en faveur de Mélie et des siens.

 

tailleur

Le tailleur de pierre de Camilla Läckberg

   Une enfant est retrouvée dans la nasse d’un pêcheur de homards. L’autopsie révèle des traces d’eau savonneuse, et de suie dans les poumons attestant du meurtre de la fillette.

   Que s’est-il passé dans ce petit village de Fjällbacka ? C’est au policier Patrick Hedström de nous le dire en confrontant, une grand-mère rétive, un père cachottier, un voisin inquisiteur et un jeune homme autiste.

   En marge des avancées policières se déroule l’histoire d’Agnès, une riche héritière destituée par son père lorsqu’elle s’éprend et tombe enceinte d’un tailleur de pierre.

   Dans ce polar venu du froid, j’ai admiré le talent de l’auteure à fourbir les composantes de son intrigue. Camilla Läckberg excelle dans l’art de diriger les soupçons dans un sens puis de faire volte face avant de repartir sur une autre piste. 

   Un roman redoutable où le lien maternel prend différents aspects.

challenge petit bac

catégorie métier


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Les yeux au ciel de Karine Reysset

   Noé, 70 ans, a souhaité réunir sa famille, pour fêter son anniversaire, dans la maison en bord de mer où il vit avec Marianne son épouse. Achille, fils du premier mariage de Noé, Lena, Merlin et Stella, les enfants et les conjoints, vont le temps d'un week-end se retrouver.

   Mais ce n'est pas les cadeaux d'anniversaire qui pèsent lourd dans les valises, c'est l'histoire personnelle de chacun. Cette tribu recomposée et élargie souffre.

   La lecture est agréable et sensible, on passe avec plaisir de l'histoire de l'un aux états d'âme de l'autre. Mais dans ce huis-clos il ne se passe rien de vraiment crucial et à la fin du week-end chacun reprend sa route avec les mêmes soucis et angoisses en bandoulière.

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  Fruits et légumes d'Anthony Palou

  Le grand-père du narrateur fuit l'Espagne franquiste et trouve refuge à Quimper. Il va y créer son commerce de primeurs et très vite fidéliser une importante clientèle. Son fils qui  reprend l'affaire n'est pas fait de la même étoffe commerciale. La concurrence des grandes surfaces lui porte un coup fatal. Le déclin du commerce de fruits et légumes entraîne celui de la famille qui va bientôt se heurter à la réalité des huissiers.

   Une réflexion sur l'emprise des grandes surfaces qui emportent, dans leurs chariots, les petits commerces de proximité. Des allées et venues entre Espagne et Bretagne, un titre rafraîchissant et très sain pour une rubrique ironico-amère émaillée de souvenirs truculents.

challenge petit bac

catégorie végétal

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3 août 2011 3 03 /08 /août /2011 21:50

trois-lumieres.jpeg

   Parce que sa famille va à nouveau s'agrandir, sa maman attendant un nouveau bébé,  une  fillette part pour l'été dans le Wexford irlandais chez un couple  qu'elle ne connaît pas, les Kinsella. Ce sont des gens protecteurs et attentifs qui vivent en harmonie avec la nature et le voisinage. Edna va former la petite fille aux  gestes simples du quotidien et à l'entretien de la maison, « nous coupons de la rhubarbe, préparons des tartes, peignons les plinthes, vidons le placard sèche-linge et aspirons les toiles d’araignée et replaçons les draps et les couvertures propres, préparons des scones, nettoyons la baignoire, balayons l’escalier, cirons les meubles, faisons cuire des oignons pour la sauce que nous mettons dans des boîtes au congélateur, désherbons les parterres et ensuite, quand le soleil baisse arrosons le jardin. »

    John va lui apprendre à se surpasser en améliorant chaque jour ses capacités en course à pied. Tout doucement la fillette se familiarise avec son nouvel environnement et y découvre bientôt le drame qui touche cette maison.

   Le temps d'illuminer l'été de cette petite fille "aussi farouche qu'une enfant gitane" et ce couple discret et généreux doit déjà se séparer d'elle.


   Voilà les vacances que l'on souhaite à tous ces enfants défavorisés qui doivent trop tôt délaisser leurs jeux et leur spontanéité pour seconder et assister des parents débordés ou irresponsables.

   Les Kinsella sèment quelques petites graines de bonheur et de tendresse dans l'esprit de cette fillette; en se développant, elles deviendront des souvenirs heureux où la petite fille pourra se ressourcer.

" Regarde, il y a trois lumières maintenant à l'endroit où il n'y en avait que deux.

Je porte mes yeux vers le large. les deux lumières y clignotent comme avant, mais une autre, constante, brille entre elles." 

    Malgré les joies simples, la sécurité des rituels et l'amour sans conditions de ce couple, l'atmosphère est pesante et les évènements passés emprisonnent les regards et alourdissent les silences. 

Les trois lumières fait la part belle au cheminement intérieur de cette petite fille qui,  avec candeur et gravité, fait ses premiers pas dans le monde des adultes.

   Un roman très court dont la subtilité est aussi à découvrir entre les lignes.


éditions Sabine Wespieser - mai 2011 -

 

 



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21 juillet 2011 4 21 /07 /juillet /2011 00:00

 

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    Bienvenue à Sandpiper!

    Ses bungalows confortables, sa dune qui chante, son pélican futé… disait le prospectus.  Alléché par les qualités de cette petite station balnéaire sise près du Pacifique, notre héros narrateur y débarque accompagné d’Emma, l’amour de sa vie, qu’il vient d’épouser. Mais quelques bières plus loin, le scénario de la lune de miel s’enraye, la belle Emma s’est fait la malle et reste introuvable.

   Les amis sont convoqués, les bus et autres trains sondés, les hypothèses les plus farfelues envisagées mais il faut se rendre à l'évidence Emma s'est volatilisée.

     Le temps de pleurer un peu sur son sort d'amant délaissé et de regretter sa bêtise et voilà notre héros pris dans les rets de la célébrité au coeur du tumulte sensationnel qui touche la petite station.

   Parce que Frida, l'Allemande, s'est éclipsée avec "un surfeur taillé dans une pub Quicksilver", laissant sur le sable de Sandpiper ses deux enfants et son mari, celui-ci a décidé de tourner sans fin jusqu'à ce qu'elle décide de revenir.

   Une journaliste exaltée va interpréter à sa manière ce fait divers et "sur le thème de Sisyphe" elle l'enrobe "d'absolu et d'absurdité" évoquant un "drame en direct".

   Les journalistes et les télévisions, les marginaux en quête d'un gourou à aduler, les curieux en recherche de plus malheureux vont se précipiter et s'installer à Sandpiper pour se repaître des allers et venues de l'Allemand.

   Notre loser préféré, fils, petit fils et arrière-petit-fils de loser, prend les choses en main et, avec d'indéniables qualités de leader, organise la nouvelle vie de Sandpiper.

 

  Dans un style complètement déjanté et barjot, où le vulgaire coule comme une petite mousse, Arnaud le Guilcher nous convie à la noce. On rit, on s'esclaffe, on pouffe dans cette mise en scène délirante où Sandpiper fait office de village de vacances paumé et miteux, où les noms des bungalows viennent de la mer et ceux des enfants des bungalows.

  Mais derrière ce décor pitoyable bat un coeur; celui d'un homme qui souffre et se désespère. Il voudrait retrouver Emma et reprendre son histoire d'amour et après cette expérience de gentil organisateur se retrouver avec lui-même dans un décor plus conforme à sa nature. 

   "Je marque à mort. On me touche, j'ai un hématome. Je me cogne et vlan, un bleu. Dans le coeur c'est pareil, je marque à mort. Un coeur brisé plein de bleus, c'est mon coeur à moi."

   L'espoir subsiste, le roman se termine par une page de pub...

  "Quinze ans après, Emma... revient.

  En librairie." 

   Et après En moins bien  la suite est Pas mieux.

 

  éditions pocket - mai 2011-

Merci News Book pour le partenariat.

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18 juillet 2011 1 18 /07 /juillet /2011 10:47

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   Quand l’auteur arrive à Granville où l’attend Marie, sa fille, il sait que les heures de sa maman sont comptées. La vieille dame a quatre vingt huit ans et une santé fragile qui se dégrade encore à la suite d’une chute. Une nouvelle infection, la fièvre, la difficulté à respirer nécessitent l’hospitalisation. Hagard et déboussolé le fils suit l’ambulance.

    Pendant les quelques heures qui suivent, désemparé mais lucide il convoque sa mémoire et s’adresse à sa maman. Les souvenirs auréolés de l’amour maternel se partagent les pages avec le babil silencieux, la respiration sifflante.

   A minuit, c’est le silence qui le réveille…

   "J'ai embrassé sa joue et retrouvé sa main. Mais pas le moindre signe. Pas un battement de cils. Pas un frémissement. Son regard tout étale semblait s'être échappé dans un autre horizon."


   Le titre est froid et sans équivoque, il sonne comme le glas dans un long matin de brouillard et de givre. Pourtant l’auteur se fait poète délicat pour écrire le bout extrême de la vie.

   Ce fils unique est extrêmement attendrissant dans son souci de bien préparer le départ de sa maman. Avec attention et délicatesse, il choisit les vêtements de la défunte, les textes de la cérémonie, les photos et les fleurs coupées qui ornent le petit guéridon.

   Un récit bouleversant et universel, un bel hommage à l’amour maternel et un doux au revoir à une maman qui part sous une pluie de petits papiers, poème déchiré, comme autant de mots d’amour à emporter dans l’au-delà.


éditions Buchet.Chastel - février 2009 -

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7 juillet 2011 4 07 /07 /juillet /2011 10:40

poule

    La famille Tousignant habite dans un coin reculé et sauvage du Manitoba au Canada. La petite poule d'eau est un lieu humide où lacs, rivières, neige et pluie empêchent les rares habitants de vivre les pieds au sec.

   Chaque année, Luzina Tousignant entreprend un long et périlleux voyage vers la ville la plus proche: Sainte-Rose-du-lac. Ce périple la mène immanquablement vers la maternité de l’hôpital.

   Son accouchement est une simple formalité, elle achète ensuite quelques cadeaux des crayons, des cartes postales pour les aînés et s’en revient lestée d’un nouveau bébé par les mêmes voies aléatoires.

   Luzina est une maman avisée, soucieuse du bien être et de l’avenir de ses enfants. Ceux-ci n’ont pas accès à l’éducation en raison de leur éloignement géographique. Elle va mettre toutes ses forces et ses ressources au service de ce projet : la création d’une école et la nomination d’une institutrice.

   Hyppolite, le papa va construire la petite école et les enseignants, dont le salaire sera pris en charge par le gouvernement vont se succéder semant de manière irréversible, les petites graines du savoir dans les petites têtes Tousignant, avides de connaissance.

 

La petite poule d'eau est un livre généreux et bon à l'image de Luzina cette maman poule qui soigne sa couvée avec amour et tendresse. C'est une réflexion sur l’accès à l’éducation et la transmission des savoirs, à mi-chemin entre les connaissances empiriques et les connaissances livresques.

   Un livre qui rappelle la vie de la romancière. Gabrielle Roy (1909-1983) née dans une famille nombreuse du Manitoba, elle y a enseigné pendant quelques années avant de se consacrer à l'écriture.

  J'ai retrouvé dans cette lecture la thématique et le pays qui m'avaient séduite dans Emilie d'Arlette Cousture.

  Un livre qui plaira aux petites filles, devenues grandes, dont le jeu préféré était de « faire la  maîtresse »


   Publié pour la première fois en 1951.


   L'avis de Sylire que je remercie pour le prêt.

 

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29 juin 2011 3 29 /06 /juin /2011 09:52

chienne-de-vie.jpeg   Bente, 42 ans, écrivain de la page blanche, échoue comme un bateau ivre sur un banc près de l'abribus. Elle n’a aucun projet, elle attend.

  Johnny le premier, verra le vide qui emplit Bente. Avec Cocotte, sa compagne, il propose à Bente de les suivre et de s’installer dans leur petite maison. Le jeune couple l’accueille avec simplicité, l’entoure de gentillesse. On déplie le canapé, on prépare des œufs au plat, on sort les grosses chaussettes de laine et le jeu de UNO si l’insomnie guette.

   Johnny et Cocotte n’attendent rien en retour, ils traitent Bente comme une invitée importante et avec discrétion l’intègrent peu à peu dans leur quotidien.

    Bente se débarrasse avec difficulté de son état d’errance et de léthargie ; elle ne semble avoir aucune maîtrise de sa vie, elle s’enlise dans la déprime.

    L’accident dont est victime Johnny agira comme un détonateur pour Bente, elle sort alors de sa réserve pour aider ses nouveaux amis.


    J’ai eu un peu de mal à supporter l’abattement de Bente, son manque de gratitude envers la chaleureuse invitation de ses hôtes, j'étais presque gênée pour elle. Je ne voyais pas en quoi cette personne neutre, assez insignifiante devenait rapidement indispensable et attachante pour Johnny et Cocotte.

   Après l'accident de Johnny, Bente retrouve un peu d’énergie - et moi avec elle- pour réaliser quelques gestes quotidiens, nourrir les chiens, rentrer le bois, visiter la vieille voisine...

   En tournant le dos à son passé, Bente s’accorde une parenthèse nécessaire pour se repositionner et créer une rupture avec sa vie antérieure. On referme ce petit livre persuadés que Bente a trouvé chez Cocotte et Johnny l'inspiration pour son nouveau roman.

Chienne de vie est l’histoire de femmes et d’hommes fragilisés qui vont s’épauler et s’entraider, se réjouir ensemble et voir la présence de l’autre comme un cadeau offert par la vie.

   J’ai pris beaucoup de plaisir à enfiler mon bleu et mes caoutchoucs pour lâcher les chiens avant de me recroqueviller dans les couvertures et regarder danser les flammes dans le poêle. 


éditions Le serpent à plumes - février 2011-

traduit du danois par Catherine Lise Dubost

 

Merci Mirontaine pour cette intimité partagée.

L'avis de Griotte.

 

 

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25 juin 2011 6 25 /06 /juin /2011 09:49

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     Enrôlés dans la guerre d’Indochine par l’armée française, le capitaine André Degorce et le lieutenant Horace Andreani ont développés des liens forts nés dans l’enfer de Diên Biên Phu et les camps du Viêt-minh.

    En ce mois de mars 1957, ils se retrouvent à Alger. Le vent a tourné, les captifs de hier sont aujourd’hui bourreaux. Leur façon différente d'assumer leur nouveau statut a raison de leur solidarité.


Où j’ai laissé mon âme ? met en scène trois personnages, trois hommes livrés à l’implacable vérité de la guerre, celle de la délation, des tortures, des massacres.

   Dans cet huis clos qu’est la villa Saint Eugène à Alger le prisonnier Tahar colonel de l'ALN est celui qui semble le plus apaisé, il va serein vers une mort inéluctable .

« Il (Tahar) est immobile sur sa paillasse, comme dans les rêves du capitaine, mais il est si calme qu’on pourrait le croire assis dans l’ombre fraîche d’une palmeraie, à Timimoun où à Taghit, regardant par delà le mur crasseux les dunes onduler sous la caresse d’un vent tiède, absorbé dans la contemplation de choses douces et mystérieuses qui n’appartiennent qu’à lui seul. »

   Le lieutenant de l'armée française Andréani s’est fait une raison et ne tergiverse pas devant son devoir. Il règle ses comptes avec sa conscience en s'abritant derrière les horreurs perpétrées par les membres de l'ALN. Il pense que chaque homme abrite le mal et la violence en son sein, la guerre ne fait qu'exacerber ce penchant naturel

   Le capitaine Degorce est un homme tiraillé, écartelé entre ses responsabilités et sa conscience. Il se trouve en porte à faux par rapport aux membres de sa famille qui le porte aux nues, il se sent indigne de cette confiance.

« Il est capable d’élaborer des raisonnements complexes et de prendre des décisions. Il sait formuler et comprendre les données d’un problème, hiérarchiser des informations. Il sait concevoir des plans nécessitant l’élaboration de conjectures à moyen et long terme. Mais, bien sûr, quand il s’agit d’écrire une lettre aux siens, quelque chose d’autre est nécessaire, quelque chose qu’il a manifestement perdu. L’âme, peut-être, l’âme, qui rend la parole vivante. Il a laissé son âme en chemin, quelque part derrière lui, et il ne sait pas où. »

 

  La lecture de Où j'ai laissé mon âme n'est pas une lecture facile. C'est une réflexion sur la torture par les tortionnaires eux-mêmes. Elle nous met au plus près des consciences tourmentées et suppliciées. Les corps se dénudent et les bourreaux entrent dans une danse macabre et douloureuse. 

   L'écriture de Jérôme Ferrari est à la hauteur de ce sujet difficile: puissante et énergique.

  L'avis de Sylire et de Stéphanie sur Landibiblog.

 

éditions Actes Sud - août 2010

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