En surfant sur la vague Simon vit des moments inouïs de peur, de jouissance et d'excitation extrême; il est un orfèvre de la vague, il sait la choisir et l'appréhender pour atteindre des sensations vertigineuses et transcendantes. Il partage cette drogue dure avec ses potes Chris et Johan. De retour d'une session très matinale, la camionnette conduite par son ami Chris percute un poteau, Simon n'a pas de ceinture et cogne violemment dans le pare-brise. Il ne survivra pas à l'accident.
Ses parents, Marianne et Sean sont alors placés face à ce dilemme jamais envisagé: le don (ou refus du don) à la médecine, des organes de leur fils.
Réparer les vivants est l'histoire d'un cœur, "la boîte noire" du corps: le muscle cardiaque qui permet la vie mais aussi le cœur, symbole de la vie affective et amoureuse. Le cœur de Simon est le personnage principal de cette histoire de transplantation. Le parcours de ce cœur, entre le donneur et le receveur, ressemble à une course-relais où tous les relayeurs (les parents, le personnel médical) œuvrent pour faciliter le passage du témoin afin qu'il arrive dans les meilleurs conditions jusqu'au receveur.
Le privilège du lecteur est de connaître toute la chaîne tissée par ce cœur, du receveur au donneur; la fiction permet de lever l'anonymat qui est de mise, habituellement, dans les dons d'organes.
C'est un livre aux multiples qualités. L'urgence de la transplantation donne du rythme, du souffle au texte, le cœur continue de battre entre les lignes. L'écriture de Maylis de Kerangall est créative et s'adapte sans cesse pour évoquer tour à tour la virtuosité des chevaucheurs de vague, la douleur crue et insoutenable des parents, la solennité lors de la demande de dons ou le jargon en usage entre techniciens de la greffe.
Le lecteur fréquente les coulisses de l'hôpital, entre au bloc au moment de la transplantation des organes, là où s'écrit un moment de grand réalisme, un travail de haute précision et de finesse: le "pinceau du calligraphe japonais, (l') amortie du tennisman". Le lecteur pénètre aussi dans les vies privées, les réflexions intimes des parents de Simon, de l'infirmier coordonnateur, du chirurgien et c'est le dosage de cet équilibre entre réalité et fiction, entre documentaire et roman qui épate et mobilise.
Réparer les vivants emporte le lecteur dans une course vitale avec toujours le souci de considérer, ménager, respecter, "réparer" les vivants!
Editions Verticales -février 2014-
Une lecture commune proposée par le Blogoclub de Sylire et Lisa
Un livre brillant et fascinant qui trouve logiquement sa place dans les pépites de Galéa.