Michel-Ange est déjà un artiste reconnu et admiré en Italie lorsque, en froid avec le pape Jules II, il s’embarque pour Constantinople là où l’attend un projet grandiose. Le sultan Bajazet l’a fait quérir pour la réalisation d’un pont qui doit rejoindre les rives de la Corne d’Or. Michel-Ange est un homme fier et orgueilleux qui ne boude pas son plaisir et accepte de s’atteler à un projet qui a vu Léonard de Vinci, son rival, échouer avant lui. Il espère secrètement que son départ pour les rives du Bosphore éveillera la jalousie et les regrets du pape.
En partant d’un fait historique, Mathias Enard nous entraîne avec bonheur dans le sillage du génie Michel-Ange sculpteur, dessinateur, peintre, architecte et poète du XIéme siècle.
Mais plus que le travail de l’artiste, nous découvrons, à travers son séjour semi oisif à Istanbul, un homme à l’humeur changeante et déroutante, un homme ambitieux et curieux qui n’a de cesse d’élargir son érudition.
Malgré un physique disgracieux et une crasse fétide, l’homme dégage une aura qui rayonne autant sur le lecteur que sur Mesihi le poète soupirant.
Le style choisi par l'auteur pour parcourir la ville est poétique et fait appel à tous nos sens: le brouhaha de la ville et des marchands, les danses langoureuses, la musique aux accents de mandore ou de viole, la dégustation de boeuf aux dattes ou de la volaille à la mélasse de caroube, les odeurs enfumées des bars de nuit concourent à charmer le lecteur qui se prélasse dans une ambiance aux couleurs orientales. Cette exotisme est mis à mal avec les conspirations, jalousies et quêtes de pouvoir.
Le portrait tout en contrastes d'un homme et de ses faiblesses, d'un artiste et de ses doutes.
Actes Sud - septembre 2010
Merci Griotte pour le trop court mais beau voyage à Istanbul.